• À propos d'un type accroché à la branche d'un arbre et qui ne veut surtout pas lâcher prise.

    Je suis dans la salle informatique de ma classe, mais je ne suis ni en cours ni pressé, et je relisais ces lignes que j'écrivais à quelqu'un il y a plusieurs mois : "Pour ce que je veux faire après, mon rêve est de faire de la bande dessinée et d'en vivre, mais bon, pour commencer je manque un peu de pratique et je compte donc dessiner une vrai bédé cet été, pas trop longue... Quoiqu'il en soit, comme je sais que c'est un peu un rêve et que c'est très difficile de percer, j'espère trouver un plan B professionnel au cours de mes études artistiques."

    Je me suis dis : Flo, tu n'écris pratiquement plus sur ton blog, alors si tu as une impulsion pour publier quoique ce soit, saisis-la. Donc je vais essayer de la saisir, et en vitesse car même si j'ai le temps ben voilà quoi.

    "J'ESPERE TROUVER UN PLAN B PROFESSIONNEL AU COURS DE MES ETUDES ARTISTIQUES". Il n'y a pas de phrase auquelle je ne croie moins. A m'entendre dire ça, à me relire formuler ça, je me fais mal au coeur.

    Parce que oui, vouloir devenir auteur de bédé, c'est un peu une sorte de rêve imbécile quelque peu compliqué. Vouloir en VIVRE, c'est encore pire.

    Je ne dis pas que je veux ABSOLUMENT en vivre : il y a beaucoup d'auteurs qui ont un métier parallèle à côté. Loïc Sécheresse, dont j'admire énormément le travail, n'a dessiné que deux bandes dessinées pour le moment, car il a à côté une pratique d'illustrateur. C'est certainement le cas également pour Dumontheuil, qui est pour moi un auteur très important de la bande dessinée actuelle : je ne sais pas exactement ce qu'il fait à côté, mais vu la rareté de son oeuvre, je crois qu'il n'y a pas de doutes, il a des à-côtés (à moins que ce ne soit la bande dessinée son "à-côté" !).


    D'autre part, je me rappelle d'une interview de Lewis Trondheim où il déclarait qu'il lui tenait très à coeur d'avoir un travail parallèle à la bande dessinée afin que cette dernière reste un plaisir et ne devienne pas une obligation alimentaire qui rabaisserait l'amour du métier, voire la valeur du travail fait (quand le travail est obligé, il n'est peut-être pas le même)

    C'est assez intelligent et je ne dis pas qu'il a tort.

    A côté de lui, un jeune auteur au talent énorme, extrêmement prometteur et même déjà très novateur dans sa manière d'envisager la bande dessinée, Bastien Vivès, déclare qu'il travailler le plus possible car son souhait est de ne faire rien que de la bande dessinée, de ne rien avoir à côté. 

    La question est donc : et moi, qu'est-ce que JE veux ? Pour l'heure, je ne sais pas vraiment.

    Il y a aussi toute une quantité d'auteurs que j'admire beaucoup mais qui travaillent bien plus dans l'illustration que dans la bande dessinée. Natacha Sicault, Lucie Albon, Erwann Surcouf en sont des exemples.

    Est-ce que je veux faire rien que de la bédé ? Est-ce que je veux faire autre chose à côté pour que mes bandes dessinées restent toujours un plaisir et non une obligation ? Est-ce que je bosse surtout aileurs mais de temps en temps je publie une petite bédé chez un petit éditeur ? 


    Je ne souhaite certainement pas cette dernière option, mais la vérité, c'est que c'est le Florian du futur qui choisira, genre celui dans trois ou cinq ans.

    Mais j'ai peur de me trahir, terriblement peur de me trahir. Il y a quelques années, je m'imaginais une très vaste histoire que je me promettais d'éxécuter un jour, jusqu'au bout. Et puis plus tard je me suis dit que ce n'était pas si bien que ça et j'ai abandonné le projet parce que ça avait arrêté de m'intéresser.

    Eh bien, voilà : j'ai terriblement peur de me laisser prendre par le flot de la vie, de me trouver quelquechose de plus alimentaire, et d'abandonner mes projets de bédés, genre pas flemme, manque de courage... De me trahir.

    Pourtant, je suis sur la bonne route. Je suis dans une classe d'approfondissement en arts plastiques. C'est un engagement, un véritable engagement qui signifie que je m'engage dans une voie en éxpédiant toutes les autres. Mais quand je dis que j'espère me trouver un plan B professionnel au cours de mes études, je dis quelquechose auquel je ne crois pas : car dire ça, Áa sonne déjà comme un relâchement, comme un lâcher-prise sur les rêves que je veux accomplir... Et je ne veux pas, lâcher prise !

    Des fois, je me dis que c'est terrible, d'avoir une vocation. Que j'aurais pu ne pas en avoir, et aller pour m'insérer dans la société d'une façon très simple, du genre je rentre dans une case. J'aurais pu devenir coiffeur, par exemple. Ça ne m'intéresse pas, mais c'est simple. Je rentre vite dans la vie active, tout ça, je m'embête pas. 

    Ou bien bibliothécaire. Ça, ça m'aurait plû d'être bibliothécaire ! Si je n'avais ce rêve de faire de la bédé, je me dirigerai peut-être vers le métier de bibliothécaire. Pour bosser aux rayons bandes dessinées bien sûr... Enfin pas forcément que ça hein.

    Mais non. Il a fallu que j'ai des rêves. Des personnages dans ma tête qui m'inventent des histoires. Il a fallu que je me passionne pour la bande dessinée, pour le cinéma, il a fallu que je rédige un roman que j'aimerai vachement adapter en bédé un jour. Il a fallu, en fait, que j'émette le souhait de m'insérer dans la société d'une façon marginale, strictement pas conventionnelle. Que j'aie des rêves.

    Et, du coup, je me trouve dans cette position délicate de garder prise. J'ai l'impression d'avoir été devant un arbre durant toute ma pré-adolescence, un très bel arbre, auquel je souhaitai m'accrocher. Alors je me suis accroché à une branche et j'ai commencé à y prendre prise. Et maintenant,  je ne lâche plus prise, je croie en mon rêve, je croie en moi, j'ESSAIE de croire en moi, j'essaie de croire que c'est possible. Au lieu de continuer un bout de chemin tranquilou, je me suis accroché à un arbre en me jurant d'y rester accroché.

    Le problème, c'est que je ne veux pas d'un métier. Je ne veux pas "être un auteur de bande dessinée". Je ne veux pas dessiner "les footballeurs" ou "sarko et Carla", ni même d'ailleurs publier des oeuvres chez des tout petits éditeurs que personne ne connaît. Parce que la bédé n'est pas un métier. Pas pour moi. Je ne veux pas être DESSINATEUR de bande dessinée, je veux étre auteur complet. Je ne veux pas faire de la bédé comme on voudrait travailler dans l'animation. Je veux devenir auteur de bédé comme on voudrait devenir écrivain ou cinéaste. Et c'est surtout ça, le problème. Parce qu'à ce moment-là, il faut un putain de talent, il faut vraiment valoir quelquechose. 

    Donc je ne veux pas juste d'un métier. Je veux d'un véritable talent, une discipline qui me vaille une certaine reconnaissance. Je veux poser ma pierre dans l'édifice de la bédé, voilà ce que je veux, et je crois que c'est effroyablement ambitieux.

    Car, QUI arrive à ce genre de choses ?! Pas tout le monde, c'est certain. Pas tout le monde. 

    A coté de ça, je me rappelle de l'insoutenable légèreté de l'être, de ce pauvre Tomas qui était un médecin renommé, discipline pour laquelle il avait une véritable vocation, pour laquelle il se sentait profondément destiné, vers laquelle il FALLAIT qu'il aille. Mais lorsqu'il devient laveur de carreaux, il est soulagé. Il a lâché prise sur une nécessité impérieuse qui au fond était un poids. 

    Alors, au fond, est-ce que si, à un moment donné, je lâche prise, si je lâchais ma "vocation" des bras, me laissai tomber de l'arbre, et soupirai de soulagement avant d'aller accomplir un métier ne nécessitant aucun talent particulier, aucune véritable préédisposition; est-ce que ça irait ? Est-ce que je ne serai pas, effectivement, soulagé ?

    Si je devenais BIBLIOTHÉCAIRE, tiens ?

    Je ne crois pas. Je crois que Tomas était déjà médecin lorsqu'il est devenu laveur de carreaux. Alors je verrai si je veux vraiment continuer dans la bédé une fois que j'y serai. NA ! Pas avant.

    Mais c'est vrai, en plus. Si je devais changer d'avis à un moment donné, il faut que soit là, lorsque j'aurai atteint mon but.

    Si je renonce avant, ce serait céder. C'est : je veux être dans la marge mais finalement je reste dans les grands carreaux, comme tout le monde. Je ne suis pas en lutte contre la société, hein, mais ce que je veux dire, c'est que, accepter de faire autre chose sans avoir encore touché la bédé, ce serait me dire : je suis un rêveur dans le mauvais sens du terme, un rêveur qui rêve sa vie et puis l'accomplit autrement. C'est un peu bateau à dire, mais il s'agit bien de réaliser ses rêves et non de rêver sa vie.

    Saint-Exupéry a écrit une phrase dans ce style-là, mais je ne me rappelle pas de sa formulation exacte.

    Je ne veux pas rêver ma vie. Je veux garder prise...


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  • Commentaires

    1
    Mercredi 10 Décembre 2008 à 17:55
    Et le plaisir !
    Et le plaisir dans tout ça ? Si tu décidais de te faire plaisir, de te donner les moyens de te faire vraiment plaisir, de prendre du plaisir à ce que tu fais, et par voie de conséquence de donner du plaisir aux autres ! Enfin bon, c'est juste une idée...
    2
    Vendredi 12 Décembre 2008 à 20:14
    Franz ?
    Il s'appelle pas plutôt Thomas ?
    3
    Vendredi 12 Décembre 2008 à 20:37
    Alors là
    Je crois que je viens de te laisser le commentaire le + rabaissant de l'histoire du blog. Tu nous confies tes doutes, tes rêves, et je corrige tes fautes de littérature. Sérieux problème de hors-sujet depuis quelques temps. Alors autant ajouter un véritable commentaire. Toutes ces réflexions me donnent une impression étrange, parce que, même si je n'avais pas de rêve aussi précis que le tien, je me suis retrouvée dans la même situation en sachant que j'étais prise à Estienne. Et j'ai fait le choix inverse, parce que justement je n'avais pas de réelle vocation, j'avais envie de ces études sans savoir quoi en faire. Mais toi, puisque tu as ce but, la meilleure chose à faire est certainement de tenter de l'atteindre, après tout ça n'est pas possible pour tout le monde mais certains y arrivent. Et c'est seulement à ce moment que tu sauras si tu es vraiment fait pour ça, si ça te rend heureux ou si devenir coiffeur te conviendrait mieux. Tout ça pour dire que... je pense comme toi. [Quel commentaire époustouflant ! ;)]°
    4
    Vendredi 12 Décembre 2008 à 23:41
    Tomas
    Okay, j'ai vraiment honte pour la faute sur Tomas… Je viens de corriger. En fait c'est une bonne chose que tu me l'aies dit, même si ça t'a obligé à écrire un second commentaire (hé hé !), parce que sinon c'était la honte quand même, je ne relis pas tous le temps mes articles alors je ne sais pas quand je m'en serai rendu compte… C'est le genre de fautes qui te viennent je ne sais ni comment ni pourquoi, comme quand tu dis "hier" à la place de "demain" sans même le réaliser… enfin bref, voilà. Sur ce, à demain !!
    5
    Samedi 13 Décembre 2008 à 12:43
    Confusion
    En fait c'est vraiment la même confusion qu'"hier" et "demain" puisque Franz existe aussi dans l'Insoutenable légèreté, c'est l'amant de Sabina qui n'aime pas son chapeau melon, donc l'inverse de Tomas (que j'avais mal orthographié, donc je suis pas meilleure que toi). A tout à l'heure !
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