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    J’ai perdu mon désir d’accomplir.

     

    J’ai perdu mon vieux blog.

    J’avais une bannière avec le titre écrit en gros et orange, j’avais une photo en mosaïque avec mon ipod qui faisait de la lumière dans le noir.

    C’était sympa, c’était mon blog. Le blog de mon adolescence.

    J’ai vingt-cinq ans et j’ai perdu mon blog tel qu’il était. Encore un truc qui me signifie combien il est dépassé.

     

    J’ai perdu mon désir d’accomplir. En échange, j’ai trouvé l’amour. C’est du donnant-donnant ?

     

    C’est comme si j’avais compris que la vie était quelque-chose de gratuit, que c’était une forme de bonus.

     

    La vie change, c’est bizarre.

     

    J’ai toujours voulu raconter des histoires. Longtemps, je me suis plongé dans l’histoire du boulchmak ultime. C’était une histoire importante pour moi, ces personnages existaient en moi, et mes pensées allaient à cette histoire, je pensais aux différents moments de vie de mes personnages. Pourtant, à un moment donné, j’ai arrêté d’écrire l’histoire du boulchmak ultime. 

    J’ai continué à noter des idées d’histoires, et puis à un moment donné, j’ai écrit l’Hydromelade. Là, j’ai écrit cette histoire en entier. Une histoire avec des personnages seuls et sans amis, mais qui se rencontrent les uns les autres. Il se passe des choses. J’ai écrit l’Hydromelade il y a longtemps, mais j’ai eu beaucoup de fierté à aller jusqu’au bout de ce récit. Encore une fois, j’avais ces personnages dans la tête, c’était facile pour moi de me mettre à leur place.

    Je n’ai jamais envisagé de faire un métier “normal”, je ne sais pas comment ça se fait. J’ai bien pensé, à la rigueur, à faire bibliothécaire. Mais pas vraiment. Je voulais raconter des histoires. J’étais plein d’histoires à raconter. Alors enfant, je voulais faire du cinéma. Et puis, j’ai voulu devenir scénariste. Puis quand je suis devenu gros lecteur de bédé, j’ai réalisé que je voulais devenir auteur de bandes dessinées. Et puis je n’aimais pas tellement mon dessin, alors j’en suis revenu à vouloir devenir scénariste. Et puis j’ai un peu progressé en dessin, alors j’ai à nouveau voulu devenir auteur complet. J’ai continué à avoir ces souhaits au collège, puis au lycée, alors même que je me penchais sur le “boulchmack ultime”, puis sur L’Hydromelade. Je ne dessinais pas l’Hydromelade en bédé, j’en faisais un roman. Je n’ai pas envisagé de faire d’autres métiers. Je voulais faire ça, c’est tout. Alors il y a eu une prépa, que j’avais très, très, très envie de faire. Je l’ai faite. C’était merveilleux.

    Et puis il y a eu l’école des arts-décos de Strasbourg, que j’ai encore plus eu envie de faire. Je l’ai faite aussi. C’était bien mais pas pareil. Pas Poudlard, non plus.  J’ai évidemment voulu rentrer en section illustration : c’était mon but depuis le début. Là encore, j’ai réussi. A la fin, j’ai eu le diplôme. Etonnant, comme j’ai réussi à accéder exactement au parcours que je souhaitais, tout en arrivant malgré cela à une issue inattendue. Ça a été cinq ans de ma vie, et j’y ai rencontré mon amoureuse. Sur la route, ma pratique du dessin s’est très considérablement améliorée. Mais il s’est passé autre chose : je ne sais pas bien pourquoi, en route, j’ai perdu mon envie d’accomplir, et j’ai perdu mes histoires. J’ai perdu tous mes personnages. Je n’ai plus personne dans ma tête. Aujourd’hui, j’ai deux ou trois idées de récits, mais je ne consacre aucun temps à les développer : si ça ne me vient pas tout seul, par plaisir, par envie de le faire, alors ça ne va pas il me semble. Comment se fait-il que j’ai perdu cette envie de raconter des choses ?… Est-ce que c’est parce que j’ai gagné une vie, une amoureuse ? Comme si en atteignant ce but suprême, tout le reste était retombé comme un soufflé. Et pourtant, j’avais une vocation, qui m’a amené jusqu’ici. Et maintenant, qu’est-ce que je fais de ma vie ? Comment je fais pour gagner de l’argent durant les prochaines décennies ? Que vais-je devenir ?

    Si j’avais su, peut-être que je serais devenu bilbiothécaire.

    C’est tellement étrange, qu’une chose pareille puisse s’évanouir, s’éteindre. J’étais animé par un truc, et ce n’est plus le cas.

    Peut-être que je ne suis pas assez seul.

    La solitude a eu une importance certaine dans le fait que je développe ces histoires.

    Au fond, j’aimerais bien, accomplir des choses, pour le plaisir de me sentir travailler bien. On a besoin d’un minimum de travail, si on ne fait que “glander” on finit dans la dépression. Et l’accomplissement est évidemment la meilleure forme de travail. 

    En ce moment, je ne sais pas ce que je vais devenir, et je ne me sens pas être grand-chose.

    Je repense à l’adolescent que j’étais, à l’admiration que j’ai pu susciter auprès d’adultes impressionnés par ma sensibilité, ce genre de choses. Aujourd’hui je me sens moins intello.

    Je vis pour le plaisir de vivre mais je sais aussi que je suis supposé faire quelque-chose de ma vie, et par ailleurs, avoir perdu ma “vocation” me perturbe. Et puis je ne peux pas avoir fait cinq ans d’arts décos pour rien, il faut bien que je me remette au travail.

     

    Je ne sais pas comme conclure, je n’arrive pas à développer ces réflexions plus loin.

    Je ne sais même pas quoi faire de ce texte, je n’ai plus de blog pour ce genre de choses.

     

    Je ne vais quand  même pas le poster sur un blog mort ?…

     


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  • Ce soir j'ai passé la soirée avec cinq autres personnes. Ma copine, et des amis. On a passé la soirée à papoter. Enfin, surtout les autres. J'ai passé ma soirée à suivre la conversation avec intérêt (parfois), à plutôt m'ennuyer (souvent), puis à beaucoup m'ennuyer quand j'ai commencé à tomber de fatigue.

    Ce qui est drôle c'est qu'Hannah a probablement été la plus bavarde de la soirée. On a un assez petit cercle d'amis mais elle est en fait assez mondaine. Parfois je crois que je ne suis bien qu'avec moi-même. Evidemment, c'est faux : dieu soit loué, je suis également bien avec ma copine. En tout cas aujourd'hui c'est la personne distincte de moi avec laquelle je suis le plus à l'aise. Mais voilà : je suis un vrai ours, quand je passe une soirée en société et qu'on ne fait que parler j'ai le sentiment de perdre mon temps, et de m'obliger à rester là sans bouger.

    Alors je retourne ici, sur ce blog, parce que je me souviens avoir déjà parlé de ça. Je me souviens avoir déjà expliqué ici que j'adorais l'introspection, rester dans mon petit monde à passer simplement du temps avec moi-même. J'espère que je ne suis pas dans une posture narcissique, ça ne me plairait pas. Je ne suis pas un sujet d'admiration pour moi-même, je suis simplement un ami avec qui j'aime toujours passer du temps. Avec les autres gens, c'est plus ou moins compliqué. 

    Alors voilà, je retourne ici pour regarder à l'intérieur de moi-même, pour voir ce que j'ai été à une époque et que je suis toujours. Un rêveur au caractère fondamentalement plutôt solitaire, qui réfléchit tout seul dans son petit coin tranquille.

    Et puis je retombe sur d'autres textes. Qui parlent de vocation, de temps qui passe trop vite, et de la procrastination.

    J'avais écrit ce genre de choses :

    "Balloté par mon présent. Emporté par le courant. Agrippé. 

     C'est la loose.

    Le temps passe et je  n'avance pas."

    Ce qui est étonnant, c'est que c'est toujours pareil aujourd'hui.

    Mais mon sentiment aujourd'hui est plus complexe : j'ai le sentiment de perdre du temps en glandant sur internet, mais je n'ai pas l'impression de perdre du temps en jouant à pokémon ou en regardant une série. Il y a une dimension de plaisir.

    Presque toute ma vie, j'ai voulu faire quelque-chose de moi-même, j'avais de l'ambition. Je ne voulais pas mener une vie "gratuite". Aujourd'hui ça ne me dérange plus, laisser des traces au fond c'est assez préntentieux. Mais le fait est qu'au moment, en gros, où je suis rentré dans une école d'art, je suis soudain devenu très humble.

    Non seulement je ne me sens pas toujours à la hauteur dans cette école (ne serait-ce que dans mon manque de savoir-faire technique, mon manque d'habitudes dans les différents ateliers de l'école), mais en plus je n'arrive pas à travailler beaucoup (ou même assez ?). Et mon travail consiste d'ailleurs dans des choses très humbles, rigolotes et pas très prétentieuses. Et je crois que c'est ce que je veux faire à présent, je n'ai pas d'autres objectifs.

    Mais je ne ressens plus aucune passion pour écrire des histoires ou même simplement dessiner pour dessiner.

    Je suis l'année du diplôme et je ne sais pas si je vais arriver à aller jusqu'au bout. Il y a quelques années, ça m'aurait posé le problème : "mais comment je vais faire pour accomplir ma vocation, mon destin ?" Aujourd'hui mon problème c'est simplement : "comment vais-je gagner ma vie l'année prochaine ?".

    Ça ne me dérangerait pas plus que ça de devenir prof d'arts plats, mais je ne sais pas à quel point ce serait difficile pour moi aujourd'hui de passer le Capes. Et par ailleurs il faudrait peut-être que je passe mon permis de conduire. C'est nul.

     

    Toujours est-il que parfois je me demande si je suis bien à ma place.

     

    Sinon, voilà, je retourne ici, sur ce blog, après l'avoir terminé, "tué", il y a deux ans maintenant (seulement ? J'ai l'impression que c'était il y a une éternité).

    Qu'est-ce qu'il m'arrive ? L'envie, d'un coup, de m'adresser à moi-même. J'aurais pu le faire dans un journal intime, ç'aurait été pareil, mais j'en ai abandonné un en cours il y a des années et je ne sais pas où je l'ai rangé.

    Alors voilà, j'écris ici, il ne doit plus y avoir personne qui traîne dans les parages. Je suis bien tranquille. S'il y a quelqu'un, n'hésitez pas à me dire coucou. 

     

    Je n'arrive pas à retrouver les textes que je voulais relire, mais ce que je voulais relire ou dire, c'est qu'il y a de la liberté dans la solitude. Parfois, il y a juste un poids qui te terrasse, où tu n'as envie de rien. Mais il y a d'autres moments où tu te sens juste enfin libre de faire tout ce que tu veux.

     

    Déjà quand j'étais au collège, j'étais très seul pour une raison extrêmement simple : dans la cour de récré, les gens parlaient, et je n'en avais rien à foutre.

    Une pensée qu'on ne dit pas, qu'on n'adresse pas, qu'on n'écrit pas, elle s'échappe, elle disparaît, elle s'oublie. Quand on traverse un moment où l'on pense à quelque-chose et qu'on souhaite se rappeller qu'on a pensé cette chose, on a envie de la communiquer, ne serait-ce qu'à soi-même.

    C'est ce que je fais ce soir.

    J'ai retrouvé les notes que je voulais relire à la base, c'était celles-ci :

    http://www.blogg.org/blog-34011-billet-autour_de_la_communication__et_plus_specifiquemment_de_la_parlotte-844289.html

    http://www.blogg.org/blog-34011-billet-je_viens_de_danser_sur_mustapha_danse_des_clash_dans_la_rue_en_rentrant_chez_moi_parce_que_la_rue_etait_deserte_et_que_cette_musique_est_trop_bonne_et_du_coup_ca_me_donne_ca-858802.html

    (l'histoire du loup solitaire est presque exactement le récit de ma soirée. Marrant)

    Le pire, c'est que non seulement je ne parle pas beaucoup aux gens, mais la vérité, c'est que je n'écoute pas beaucoup non plus. C'est une autre histoire.

     

    Pour rappel, mon nouveau blog, moins personnel puisque destiné à un public plus large, est par là : chaise-vivante.blogspot.com


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  • Ce soir, j'ai fait du rangement dans mes e-mails.

    Ça m'a amené à relire de vieux messages d'il y a un ou deux ans. Il y a des choses qui m'ont rendu nostalgiques. Des correspondances qui se sont effacées.

    Si on ressent le temps qui passe, si l'on peut être nostalgique, c'est à cause de la mémoire. 

    On trouve toujours que le temps passe trop vite, c'est parce qu'on a une trop bonne mémoire. La mémoire est le passé. Le passé n'existe que dans le souvenir. Comme un être cher qui est décédé.

    C'est un peu affreux à dire, mais mon année de prépa, c'est quelque-chose de décédé. C'est quelque-chose qui est dans ma tête, dans celle d'autres personnes, mais qui n'est plus. 

    C'était une excellente année. D'un côté, la prépa en elle-même a été une expérience vraiment extraordinaire et particulièrement enrichissante. Aujourd'hui je ne garde que les bons souvenirs, et ils sont vraiment très très bons. Les concours, sont d'excellents souvenirs…

    D'un autre côté, il y a eu ces trois rencontres, avec des personnes de mon âge que j'ai connues par internet, entre autres grâce à ce blog, et que je n'aurais jamais pu avoir en face de moi sans cela. Des personnes franchement intéressantes, dont les personnalités restent encore assez présentes dans mon esprit.

    C'était génial, de rencontrer ces gens. Je suis encore en contact avec Swani, mais avec les deux autres personnes, c'est très très effacé, et je trouve ça véritablement dommage. J'en garde quelque-chose de très beau, un peu piquant, pimenté, inédit… c'était très nouveau pour moi et ça ne s'est jamais répété de cette façon-là. J'en garde une puissante nostalgie.

    Or, c'est arrivé la même année que la prépa. Donc, pour moi, cette année-là, c'était une sacrée année !… Une très très belle année, sans doute pivot dans ma vie… une année très marquée dans ma mémoire. Une année qui restera bien au chaud dans mes souvenirs. Une année qui est morte, dont il n'y a plus beaucoup de traces, et qui me manque à la manière d'un être cher.

    Sentir le temps qui passe, c'est se souvenir. 

    Ma vie actuelle est extraordinaire. Strasbourg est une ville super. Mes colocs sont super et on passe de très bons moments ensemble. Mon école est géniale. J'ai de bon(ne)s ami(e)s. Mais, surtout, j'ai une amoureuse. Pas n'importe quelle amoureuse. Le genre d'amoureuse avec laquelle tu te sens en osmose !… C'est très super comme sensation. J'attendais ça depuis toujours. C'est extraordinaire.

    Bref. Donc je vis une époque de ma vie géniale. Mais n'empêche : ça ne m'enlèvera pas que mon année de prépa, avec les gens que j'y ai rencontré, et avec les autres gens que j'y ai rencontré à l'extérieur grâce à mes traces laissées sur internet, c'est une année qui est morte, qui me manque un peu, et à laquelle je repense souvent.

    C'est une année qui me rappelle que le temps passe. Le temps passe et cette année-là s'éloigne de plus en plus.

    Peut-être que dans quelques années je vais être extraordinairement épanoui. Mais ça n'enlèvera pas l'éloignement effrayant que le temps m'impose entre ma personne et cette année-là.

    Le temps qui passe, c'est les souvenirs qui envahissent ta vie.

    Quand je passe du temps avec ma grand-mère paternelle, elle passe beaucoup de temps à raconter ses souvenirs. C'est précieux, et agréable à écouter. 

     

    Les gens n'aiment pas voir le temps faire mourir les belles choses, et c'est pourquoi il y a beaucoup d'histoires qui se figent dans le temps.

    Bill Watterson fait défiler les hiver, printemps, été et automne dans les strips de Calvin et Hobbes… Mais malgré cet écoulement des saisons qui se répétent régulièrement, Calvin continue d'avoir six ans.

    Schulz, lui, a passé cinquante années de sa vie, à raconter les histoires de personnages qui ne grandissent pas… qui restent dans la permanence.

    C'est comme des repères. Des choses qui, elles, au moins, ne changent pas ! Ce n'est pas désagréable.

    Mais bon. Ce n'est pas désagréable non plus quand une oeuvre de fiction parle du temps qui passe.

    Cette nostalgie dont j'ai parlé, elle est sans doute très présente dans la série Donjon, que j'aime énormément, de Joann Sfar et Lewis Trondheim. Trois époques, pour une seule histoire : celle du Donjon. Voir Hyacinthe de Cavallère, alias la chemise de la nuit et amoureux d'Alexandra, vivre ses aventures à Antipolis, et l'album d'après, lire ce qu'il devient une bonne cinquantaine d'années plus tard en tant que gardien du donjon… Ça, c'est parler du temps, du temps qui passe et qui meure. Car le gardien du donjon n'est plus vraiment Hyacinthe de Cavallère. 

    Voir Herbert de Vaucanson devenir le grand khân dans Donjon Crépuscule… Voir Marvin devenir le Roi Poussière… Voilà des choses qui font envisager le déroulement du temps et la mort de l'instant donné.

    J'aimerai me replonger dans les romans de John Irving. C'est quelque-chose que j'aime énormément chez cet écrivain : le fait d'accompagner un personnage dans le temps. Le voir grandir, évoluer, vieillir… Irving parle du temps qui s'écoule, de la mort de ce qui passe, j'aime beaucoup ça.

    Il faut que je relise du John Irving.

     

    Il faut que je me couche. Je crois que j'ai réussi à écrire ce que j'avais envie d'écrire.

     

    (on essaie de figer le temps, de l'immobiliser, de le capturer, en prenant des photos, des films, en écrivant des textes. Mais ce ne sont que des traces, et donc des souvenirs. Le souvenir constituent le passé mais il ne le ressuscite pas. Ces tentatives pour capturer un moment donné ne font que faire exister le passé. Mais faire exister le passé c'est déjà quelque-chose de très fort. On peut préférer ça à ne plus exister du tout)


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  • Si je meurs à 80 ans ou plus, il me semble que ce sera avant tout la mort d'un pépé.

    Ce type, ce vieillard de 80 ans, condamné à mourir, ce n'est pas tout à fait moi. Enfin, si, c'est moi… Mais pas exactement.

    Quand un individu meurt, on annonce la nouvelle accompagnée d'une photo récente… Ça ne viendrait à l'idée de personne de présenter la photographie d'un homme à l'âge de la trentaine, lorsqu'il vient de mourir à 80 ans.

    Ce qui m'intéresse avec cette idée, c'est l'idée de dernière mort.

    J'aime bien tenir des journaux intimes. Et, ce soir, je me suis retrouvé dans la situation de relire le journal intime que j'ai tenu alors que je faisais mes révisions pour le bac en Juin 2008. Eh bien, il s'en est passé des choses, dans ma vie, en Juin 2008. Et des pensées qui m'ont traversées le crâne, il y en a eu aussi.

    Ces pensées, ce ne sont plus vraiment les miennes. Il y a des réflexions écrites dont je vais être embarrassé, car j'ai changé. D'autres dont je serai encore fier.

    Il y a des événements que j'ai immortalisé dans ce cahier : mais, avant de m'y replonger, ces événements étaient morts. Ils n'étaient plus que de vagues souvenirs sans importance, peu présents en moi, et qui resurgissent là en plein figure avec beaucoup de puissance.

    Ce que je veux dire, c'est que le Florian Duchesne de Juin 2008, d'une certaine façon, il est mort. Ses pensées ne sont plus exactement les miennes, son vécu est déjà pour moi un lointain souvenir… Bizarrement, il s'agit déjà d'une autre vie. Or, lorsque je relis ce journal intime, ce Florian Duchesne de Juin 2008 ressuscite. Il revient à moi, fait acte de présence, de par la mémoire, le souvenir.

    Tant que ces journaux intimes existeront, tous ces Florian Duchesne ne seront pas vraiment morts : ils ressusciteront ponctuellement, tandis que je réactiverai leurs mémoires en m'y replongeant avec intérêt.

    Je redécouvre ce que j'ai été, il n'y a pas forcément si longtemps que ça.

    De la même manière, ma vraie mort (un jour) sera elle-même à nuancer à partir du moment où il restera des traces de moi, des enregistrements de moi, qui, d'une certaine façon, me "ressusciteront".

     

    C'est pour ça qu'il paraît facile de dire qu'un Serge Gainsbourg, par exemple, est immortel : il est dans notre souvenir à tous, de manière très précise, puisque sa mémoire se retrouve réactivée par ses chansons, ses photographies, les captations filmées de sa personne…

     

    Ce que je veux dire, c'est que le vieux pépé de 80 ans qui va mourir, ce ne sera plus l'homme mûr de cinquante ou soixante ans, et ce ne sera plus le quadra, et ce ne sera plus le trentenaire à la fleur de l'âge, etc.

    Le Florian Duchesne bébé, il n'est plus là qu'à travers la mémoire qu'on lui porte. Mais moi, je ne suis plus ce bébé. Ce bébé, il est mort, d'une certaine manière. 

    On meurt progressivement avec le temps qui passe, mais comme on existe toujours, on ne s'en rend pas compte. 

    Mais quand on se replonge dans son passé et qu'on se rend compte à quel point c'est dépassé voire oublié, et dans tout les cas, transformé, on réalise à quel point cet individu-là, cet individu-là précisément, n'appartient plus tout à fait au monde.

     

    Evidemment, j'ai tort, car une personne ne se définit pas seulement par sa mémoire ou ses pensées, mais aussi par sa nature, sa personnalité… Puisque je partage des traits communs avec les Florian Duchesne passés, alors ils ne sont pas tout à fait morts puisque ces traits sont encore tout à fait en moi.

    (par exemple, en relisant ces notes de révisions du bac, j'y ai écrit des notes où je panique sur mon incapacité à me mettre au travail malgré que l'examen se rapproche, que j'aurais pu tout aussi bien écrire aujourd'hui en Janvier 2011… malheureusement je n'ai pas changé. Il y a aussi des passages sur la peur de ne pas être à la hauteur et sur le fardeau d'avoir une "vocation", qui sont plus ou moins toujours les mêmes.)

     

    Tout cela est donc largement à nuancer.

     

    Pourtant, il me semble qu'il y a du vrai : si je meurs à 80 ans, le jeune homme de vingt ans qui est en train, en ce moment-même, de taper sur son ordinateur, d'une certaine manière, ce garçon-là sera "mort" depuis longtemps.

    Jusqu'à réactivation de sa mémoire.

    Mais, on est bien d'accord : la mort du vieux pépé, c'est la dernière des morts. Celle qui signe l'arrêt définitif de tous les Florian Duchesne à la fois, excepté à travers la mémoire qu'on gardera de lui éventuellement.

     

    (on pourra sans doute formuler, après tout ça, que le seul Florian Duchesne véritablement en vie est celui de l'instant présent… tous les autres sont plus ou moins morts. C'est sans doute commun à dire, mais n'empêche que c'est vrai)


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  • C'est terrible, de me retrouver aussi vite de mauvaise humeur alors que je rentre à peine de vacances.

    J'ai vraiment passé d'excellentes vacances. J'ai fait plein de choses. C'était vraiment cool.

    Mais, là, à peine rentré que ça ne va déjà plus.

    Du genre : c'est bon, je suis rentré en cours, je dois me remettre au boulot.

    Or, je n'arrive pas à me mettre au boulot. Zéro volonté. Je ne peux quand même pas lire de bandes dessinées, ou regarder des séries télés : je ne peux pas assumer à ce point-là le fait d'être en train de ne pas travailler.

    Alors, je vais le plus souvent possible sur mon ordinateur… A guetter des mails. A guetter facebook. A jeter des coups d'oeil réguliers sur des sites assez triviaux, comme allocine.com par exemple. Je cherche des moyens pour perdre mon temps. J'essaie de trouver un moyen de passer le plus de temps possible sur internet sans m'ennuyer. Parfois, j'y arrive. De cette manière-là, j'arrive extrêmement bien à ne pas travailler.

    Aujourd'hui, j'avais toute la journée pour bosser : je n'avais pas cours du tout. 

    Mais, vous allez voir, je me suis très bien débrouillé. D'abord, ce matin, j'ai dormi. J'avais mis mon réveil à huit heures trente. Mais, à huit heures trente, je l'ai remis à huit heures quarante cinq, ou neuf heures, je ne sais plus. Mais je l'ai mis sur la fonction radio, pour me lever en douceur. Mais je n'avais pas remarqué que le volume de la radio s'était baissé tout seul : ça ne m'a pas réveillé. Je me suis donc levé plus tard que prévu, et après avoir écouté la radio au lit un certain temps, j'ai petit-déjeuné tranquillement.

    Je m'étais dit : "ce matin, je dessine au moins dans mon carnet footing".

    Mais je finis par passer ma matinée à regarder des sketchs des robins des bois sur youtube, grâce à une amie facebook qui en avait mis un sur son profil.

    J'ai été invité à déjeuner ailleurs pour la galette des rois, ainsi que pour une soupe de poisson : je suis arrivé un peu en retard, à cause des robins des bois.

    Ce repas était censé être une parenthèse agréable au milieu d'un journée acharnée, passée à travailler avec efficacité.

    L'après-midi, en repartant du lieu de mon déjeuner, je comptais passer à la médiathèque, assez proche de là, pour rendre des documents et en prendre d'autres, dont certains pour les cours, d'ailleurs. Mais j'ai oublié les dvd chez moi, et je viens de recevoir un avis de retard : l'un des dvd est en retard, tant que je ne le rends pas je ne peux pas reprendre de documents.

    Je rentre donc chez moi pour récupérer les dvd, au lieu de me rendre directement à la médiathèque. Puis, j'y retourne. A cause de mon étourderie, j'ai donc perdu du temps. Sur la route, je me rends compte que je n'ai pas pensé à prendre les CD avec moi. Mais je me dis que ce n'est pas grave, puisqu'ils n'ont pas encore dépassé le délai de retard. Les trois documents pour lesquels j'ai reçu un avis de retard, eux, sont bien dans mon sac à dos : c'est ce qui compte.

    J'arrive à la médiathèque. Je rends mes documents. Je vais à l'étage où il y a des dvd. Après avoir cherché un peu, je trouve plein de choses. Je trouve Journal intime, de Nanni Moretti, que je serai ravi de revoir, je trouve huit et demi de Fellini que j'aimerai beaucoup voir, je trouve Fast food Fast woman de Amos Kollek que j'adorerai revoir, je trouve Hana-bi que je rêvais de trouver disponible à la médiathèque. Après une certaine hésitation, je finis par choisir Huit et demi et Hana-Bi.

    Je monte alors au troisième étage, et pars à la recherche des livres à propos de l'analyse des gestes que j'ai trouvés et listés sur le moteur de recherches de la médiathèque, de manière à m'aider pour mon travail à faire en didactique visuelle. Je trouve un peu lentement, mais sûrement, les documents recherchés.

    Alors, je sors ma carte de médiathèque, et passe mes emprunts à la machine : il me parle de dix-huit jours de retard sur mes documents, et ne me laisse donc pas faire d'emprunts. Je flippe un peu, mais je me dis que j'ai rendu ces documents-là, en retard de dix-huit jours : si la machine ne veut pas le prendre en compte, je dois bien pouvoir trouver un autre moyen de régler ce problème. Je vais sur un ordinateur pour vérifier que les documents rendus ne sont plus sur mon compte lecteur. Ils n'y sont plus. Mais il reste les CD. Qui sont en retard. Depuis le quatre Janvier. Soit deux jours. Trop peu pour avoir déjà reçu un avis de retard, mais suffisant pour ne pas pouvoir réemprunter de documents…

    J'ai la haine contre moi-même. J'ai perdu mon après-midi de manière débile, et entièrement de ma propre faute.

    A contre-coeur, je laisse mes documents sur le lieu.

    Quand je me retrouve en galère, c'est toujours de ma propre faute. Ça m'énerve.

    Je m'en veux. Je suis en colère contre moi.

    J'ai perdu mon après-midi et de super documents risquent de m'échapper des mains s'ils sont déjà empruntés d'ici demain.

    Je rentre chez moi sur les nerfs. Je suis sur les nerfs.

    Je traîne sur l'ordi deux minutes. Je sors mon carnet footing, je me dis que le fait de dessiner des bêtises me calmera peut-être. Ce sont en effet des bêtises que je dessine. Je gribouille des choses qui n'enrichissent pas mon carnet.

    C'est extrêmement difficile, de produire des dessins qui enrichissent mon carnet.

    Je n'ai pas envie de travailler. Je passe du temps sur l'ordinateur.

    Globalement, j'ai le sentiment d'avoir passé un journée assez merdique. Entièrement à cause de moi-même.

    En plus, ce n'est pas facile de se mettre au travail. Parce que ce n'est pas facile de se mettre à faire quelque-chose de bien.

    Ça fait peur, quelque-chose de bien. On a peur de ne pas en être capable. Alors on fait traîner.


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