• Délire

    - Mais je n'ai RIEN à leur écrire ! cria-t-il désespérement.

    - Comment ça ? Comment ça, t'as rien à leur écrire ? T'as FORCÉMENT quelque-chose à dire !...
    -Beh... L'autre jour, j'avais bien une idée, mais... mon internet a buggé alors que j'étais encore en train d'écrire...

    - AH ! Merde !

    Un silence gêné tomba. Celui qui n'avait "rien à leur écrire" était un maigrelet torse nu et couvert de bleus, ligoté par un entremêlat confus de cordes collées autour de lui, assis sur une drôle de chaise, qui, à vrai dire, bougeait.

    - Je crois que... Je crois que ça a servi à rien de le taper...

    Le bourreau, une armoire à glace aux cheveux rasés, aux yeux enfoncés comme des racines sous terre, à une mâchoire si carrée que le bas de son visage ressemblait à la base d'un triangle, et à la moustache aussi touffue qu'un balai-brosse, jeta un regard noir et vif à la chaise qui venait de parler.

    - Si... Si j'avais su, je l'aurais dit au boss, et... et on en serait pas arrivés là... Fallait le dire tout de suite... Ça change TOUT, si vous aviez essayé de faire une note...

    Le maigrelet avait le visage baissé, ses cheveux longs couvraient son visage.

    - Ça... Ça va ? demanda le bourreau.

    Après un court silence, le maigrelet répondit simplement :

    - Non...

    Le bourreau se tordait les mains, fronçait ses sourcils.

    La chaise demanda :

    - Bon, et après, pourquoi t'écris pas de note ?

    - Mais... Mais parce que j'ai rien à dire ces temps-ci, c'est tout! Rhôh, là, faut me lâcher les basques, c'est pas comme si mon blog était un journal intime ! J'écris quand j'ai envie d'écrire, ou quand j'ai quoique ce soit à dire et... et, voilà, c'est juste pas le cas en ce moment...

     

    - Et ce court texte que tu as écrit avant de te coucher, hier soir, hein? Ça mérite pas d'être développé?

    - J'en sais rien... Je m'en fous...

    - Tu sais ce que je crois ? continua la chaise.

    - Jsais pas... soupira le maigrelet. Ses bleus lui faisaient encore mal.

    - Jcrois que t'as encore TOUT à dire, mais que tu ne peux pas penser à tout, et que tout n'est pas forcément utile à développer...

    - Oui, sûrement...

    - N'es-tu pas comme un cueilleur dans un champ? Regarde, tous les fruits que tu n'as pas ramassé...

    - Je cueille, quand j'ai ENVIE de cueillir... Tous les fruits que j'amasse ne sont pas aussi bons les uns que les autres, en plus.

    La chaise se tût enfin.

    Comme s'il doutait que cela ait suffit, comme s'il s'était cru légèrement coupable, le maigrelet rajouta :

    - Nan et puis j'ai quand même d'autres choses à faire ! J'ai d'autres choses à écrire, moi ! J'ai une nouvelle sur le feu, et puis cet énorme projet... En ce moment, je pense à alimenter un personnage auquel j'avais pas tant pensé, jusqu'à présent.

    - Bon, bon.

    Pendant ce temps-là, le bourreau s'était mis en tailleur dans un coin, écoutant la discussion de la chaise et du détenu.

    - Non, et puis... Il faut vraiment que j'ai l'envie d'écrire, parce que... au fond... S'il n'y avait pas d'envie, je crois que ça ne me servirait à rien, tous ces textes... Ce n'est pas parce que je vais écrire un texte où je me questionne sur la vie, sur la vie par rapport à la mort, sur la mort, sur la notion d'ennui et de routine par rapport à la vie, sur la question du SENS et de la quête, sur la remise en question du matérialisme contemporain, que demain j'en serai plus épanoui... Peut-être qu'une note pareille, malgré toute la pertinence qu'elle pourrait avoir, ne servirait tout simplement à rien... Malgré toutes les pensées et les textes qu'on peut écrire, on reste les mêmes, et, après tout, ce n'est pas mal, je suis bien dans ma vie...

    - Parce que tu voudrais écrire dans le sens d'une quête ?... demanda la chaise.

    - Chais pas moi... Non, oui... Pas tout le temps...

    Ils se tûrent.


    Le rabougri finit par rompre le silence :

    - Euh... Dites...

    - Oui? fit la chaise.

    - Est-ce que...Est-ce que euh... Est-ce que vous pourriez me libérer ?...

    - Ah, oui, pardon...

    Les cordes se défirent alors comme des serpents tombant d'un arbre.

    - Je peux... Je peux partir ? demanda encore le détenu.

    - Oui, oui...

    Le maigrelet fila vers la sortie, ouvrit la poignée de la porte, puis, avant d'ouvrir, précisa :

    - Vous inquiétez pas, hein... Quand j'ai envie d'écrire, j'écris...

    Puis, il sortit et referma la porte derrière lui.


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  • Commentaires

    1
    Jeudi 13 Décembre 2007 à 17:52
    waïe!
    Se coucher à trois heures du matin pour travailler… :0 Je pourrai jamais de la vie ! Bonne récupération de sommeil alors, chère Agathe!
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    2
    Jeudi 13 Décembre 2007 à 17:53
    waïe! again
    Bon en fait j'ai dit ça mais ça se trouve tu hyperbolais et là j'ai l'air d'un gros crétin en fait… Bah, de toutes façons, mais si c'est un hyperbole je pourrais pas me coucher très très tard pour taffer. Oui, oh, j'essaie de me rattraper comme je peux…
    3
    Jeudi 13 Décembre 2007 à 17:55
    waïe! again
    "Même", pas "mais"! pardon (genre celui-ci qui se rajoute plein de coms lui-même sur son blog, c'est pathétique…-
    4
    Vendredi 14 Décembre 2007 à 20:50
    héhaaaaaaaaaaaahaaa
    bon, en fait je me suis couchée à 01heure du mat avec ces conneries, mais je n'hyperbolais pas, donc tu n'avais pas l'air con ! Mais c'est marrant comment tu essaies de te justifier après;... enfin moi je dis ça je dis rien (DANS CE CAS DIS RIEN AHAHA !)
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